Le moineau du forçat - posté par K.Hadjoudja

Publié le par LAGHOUATI

LE MOINEAU  DU FORÇAT

 

SI EL HADJ MOHAMED, votre histoire poignante du canari  « TRISTE SORT » ; me rappelle une autre similaire de PIERRE LOTI. En voici un extrait.

« Un NAVIRE DE TRANSPORT était chargé de transporter des forçats en NOUVELLE CALEDONIE. Dans le nombre se trouvait un condamné très âgé, qui emmenait avec lui, tendrement, un pauvre moineau dans une petite cage.

Un marin du bateau, pour passer le temps, était entré en conversation avec ce vieux…tout heureux de voir que quelqu’un consentait à l’écouter avec compassion, le forçat avait montré au marin ce qu’il possédait de précieux au monde : LA PETITE CAGE ET LE MOINEAU. Le moineau apprivoisé, connaissait sa voix, et qui pendant près d’une année, en prison, avait vécu perché sur son épaule.

Ah ! Ce n’est pas sans peine qu’il avait obtenu la permission de l’emmener avec lui en CALEDONIE !

Pauvre moineau ! Il avait pour manger dans sa cage un morceau de ce pain gris qu’on donne dans les prisons ; et il avait l’airde se trouver content tout de même ; il sautillait comme n’importe quel oiseau.

Quelques heures après, au moment de l’embarquement pour le grand voyage ; le marin qui avait oublié ce vieux, repassa par hasard près de lui.

« Tenez, prenez la, vous, dit-il d’une voix toute changée ; en lui tendant la cage, je vous la donne ! »

« Non ! Certes, remercia le marin. Il faut l’emporter au contraire, vous savez bien ; ce sera votre petit compagnon la bas… »

« Oh ! reprit le vieux, il n’est plus dedans… vous ne saviez donc pas ! Il n’y’est plus… » Et deux larmes d’indicible misère lui coulaient sur les joues.

Pendant une bousculade de la traversée, la porte s’était ouverte, le moineau avait eu peur, s’était envolé, et tout de suite était tombé à la mer à cause de son aile coupée.

Oh ! Le moment d’horrible douleur ! Le voir se débattre et mourir, entrainé dans le sillage rapide, et ne pouvoir rien pour lui.

D’abord, dans un premier mouvement bien naturel, il avait voulu crier, demander du secours, s’adresser au marin lui-même, le supplier…élan arrêté aussitôt par la réflexion…un vieux misérable comme lui, qui est ce qui aurait pitié de son moineau, qui est ce qui voudrait seulement écouter sa prière ? Est ce qu’il pouvait lui venir à l’esprit qu’on retarderait le navire pour repêcher un moineau qui se noie, et un pauvre oiseau de forçat, quel rêve absurde !...

Alors il s’était tenu silencieux à sa place, regardant s’éloigner sur l’écume de la mer le petit corps gris qui se débattait toujours.

Maintenant que l’oiseau n’y était plus, il ne voulait pas garder cette cage, construite avec tant de sollicitude pour le petit mort ; il la tendait toujours à ce brave marin qui avait consenti à écouter son histoire, désirant lui laisser ce legs avant de partir pour son long et dernier voyage.

Et le marin, tristement, avait accepté le cadeau… »

 

 

 

 

Publié dans K.HADJOUDJA

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
D
Elle est triste mais elle est belle cette histoire.
Répondre